Par : Gersende Guédon, Directrice des Opérations France
Temps de lecture : 5 minutes
La relation aux soins 3.0
Ces dernières décennies, notre société a vu la relation médecin-patient se transformer pas-à-pas. Le renforcement du droit des malades et du consentement éclairé, l’accès facilité à l’information grâce aux nouvelles technologies, la formation des malades atteints de maladies chroniques en vue de leur soin en autonomie, la prise en compte de l’individu et la dissociation entre le « cure » et le « care », ont amené la relation soignant-patient à évoluer vers une plus grande collaboration. Une « alliance thérapeutique » où la communication, le droit à l’accès à l’information, l’engagement du patient et un accompagnement plus personnalisé, sont clés.
Pour y parvenir, les systèmes de santé tentent continuellement de fournir les meilleurs soins aux patients. Cela passe notamment par le développement de services d’accompagnement des patients, l’amélioration et la fluidification des relations entre la ville et l’hôpital, mais également par une meilleure compréhension et caractérisation de l’état de santé des populations. Or, cela n’est possible qu’à condition d’avoir accès en continu à toutes les informations concernant le patient : celles transmises par le médecin et celles transmises par le patient lui-même.
Mieux comprendre le vécu et l’état de santé des patients
Cette dualité « patient-soignant » est essentielle car ce qui est perçu comme important pour le patient n’est pas forcément ce qui est important pour le professionnel de santé.
De nombreuses études le montrent. L’une d’elle dans le diabète indique par exemple que le concept du « diabète contrôlé » peut avoir une signification très différente entre les patients et les soignants. Les soignants évoquent l’évaluation du contrôle du diabète sur la base d’indicateurs cliniques tels que l’HbA1c, tandis que les patients mettent en avant la façon dont ils vivent leur maladie, à quel point celle-ci perturbe leur vie normale, et mentionnent l’impact de leur comportement sur leur diabète.[1]
Le PRO ou PROM (Patient Reported Outcomes [Measures]), est un outil dont l’objectif est de réduire l'écart entre la vision du professionnel de santé et celle du patient sur la réalité clinique et d'aider à adapter la prise en charge pour mieux répondre aux besoins du patient.
Le PRO : de quoi parle-t-on et à qui profite l’outil ?
Le PRO permet au patient de saisir non seulement ses informations cliniques mais également sa perception générale de son état de santé, sa qualité de vie, son moral, son humeur, son rapport sur l’évaluation de ses soins de santé etc. [2], notamment au travers de questionnaires.
Les patients entrent de l’information dans le PRO afin de construire un historique de leur perception de leur état de santé, dans l’objectif de pouvoir ensuite le consulter et évaluer l’évolution de celui-ci. Certains PRO proposent également aux patients d’avoir accès aux données agrégées de leurs pairs afin qu’ils puissent se comparer, se rassurer, se projeter ou prendre des décisions. L’objectif in fine est de pouvoir suivre son état de santé et dans une certaine mesure de pouvoir apporter de l’information aux équipes de soin, afin de mieux personnaliser la prise en charge et l’adapter à leurs besoins réels.
Ainsi, le PRO permet aux professionnels de santé, non seulement de gagner du temps, en ayant une compréhension approfondie de l’état de santé du patient en amont ou lors de la consultation, mais également d’obtenir des informations et des alertes en temps réel.
Pour leur part, les acteurs de santé peuvent mieux caractériser le niveau de santé des malades. En effet, avoir la perspective et leur ressenti est clé pour une meilleure prise en charge individuelle mais aussi une meilleure politique de soins.
Un outil en vogue au service de l’alliance thérapeutique
Il est indéniable que les acteurs de santé montrent un intérêt croissant pour les PRO. En effet, à l’heure où les politiques publiques de santé évoluent et sont de plus en plus considérées par le prisme du patient et du résultat en vie réelle des traitements et parcours de soins, l’outil PRO semble apporter une valeur ajoutée forte. Et cela tant à l’échelle de l’individu dans la gestion de son traitement que de la relation soignant-patient, qu’à l’échelle de la société car il permet une agrégation de données précises et complète sur le ressenti patient et l’efficience des soins.
Le PRO peut donc être vu comme un projet en soi ou une brique fonctionnelle qu’il est possible d’intégrer à tous projet e-santé déjà en place ou à développer.
Encore assez récent, il n’existe cependant pas de standardisation du développement et déploiement de ce type d'outil à l’heure actuelle. Aux Etats-Unis, l’ICHOM, un consortium international, vise à établir des standards de mesures par aire thérapeutique.
Vous réfléchissez à mettre en place un PRO ? Suivez le guide !
Cadre réglementaire : DM (dispositif médical) or not DM ?
Le cadre règlementaire existant ne permet pas toujours une distinction simple et claire entre statut DM ou non DM pour un PRO donné. Même si le régulateur tend à préciser et simplifier le cadre, il est crucial de bien analyser chaque situation, à partir d’une vision claire des fonctionnalités et questions du PRO.
La recommandation d’Observia : Soyez vigilant ! En cas de doute, nous sommes à votre écoute pour vous conseiller dans le design de votre solution PRO.
Données patient : communiquer et rassurer sur la transmission et l’utilisation de ses données pour favoriser l’usage de l’outil.
La recommandation d'Observia : Mettre un point d’honneur à être transparent sur le traitement des données de santé : l’ensemble des données doit être hébergé chez un hébergeur agréé des données de santé et les outils développés conformes avec le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).
L’intégration dans les usages existants :
Il est primordial que les équipes soignantes perçoivent l’intérêt d’un tel outil et son impact pour être en capacité de bien expliquer sa valeur et son intérêt au patient. Ce sont les vecteurs de leur mise en place.
La recommandation d’Observia : Intégrer dès le début de projet les équipes soignantes dans la construction, le développement et la mise en place de l’outil. Cela assurera une meilleure compréhension de l’outil et facilitera leur communication auprès des patients par la suite. Ne négligez pas le temps de recrutement de ces acteurs, il peut parfois être très long !
Engagement des patients :
Afin que le PRO soit adopté par le patient, travailler les mécanismes d’engagement est essentiel : quels éléments doit-on mettre en place pour que le patient perçoive l’intérêt de l’outil et souhaite l’utiliser tout au long de son parcours de soin ?
La recommandation d’Observia : Le succès de votre PRO passera par sa co-construction avec les patients et futurs utilisateurs de l’outil et l’intégration de certaines méthodes de sciences comportementales afin de bâtir un processus d’engagement robuste.
[1] https://pdfs.semanticscholar.org/24ab/e498892e6da97a63c7457540a420e9aefaee.pdf
[2] Unlocking the Power of Patient-Reported Outcome Measures. Health Catalyst Editors. February 26, 2009. https://www.healthcatalyst.com/insights/unlocking-the-power-of-patient-reported-outcome-measures-proms/
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